Quelle étrangeté dans ce texte de la première lecture ! « « Quand un homme aura sur la peau, une tumeur, une inflammation ou une pustule, qui soit une tache de lèpre, on l’amènera au prêtre Aaron ou à l’un des prêtres ses fils. Le lépreux atteint d’une tache portera des vêtements déchirés et les cheveux en désordre, il se couvrira le haut du visage jusqu’aux lèvres, et il criera : “Impur ! Impur !” » (Lv 13,2.45). On entend beaucoup de choses sur la pureté et l’impureté dans l’Ancien Testament. Elle est tantôt méprisée : « encore une de ces préceptes bons pour les pharisiens », tantôt complètement niée : « rassurez-vous, cette notion a été abolie par Jésus ». Avouons simplement que cette catégorie de lecture du réel nous échappe.
Dans la Bible, est « impur » ce qui porte la marque d’une victoire de la mort sur la vie : un cadavre est impur, une tumeur confère l’impureté. Le simple contact avec un objet ou un corps impur confère l’impureté à la personne qui le touche. Au contraire, recouvrer la pureté implique une série de rites au terme desquels la personne qui a eu contact avec l’impureté est rétablie dans son intégrité.
Par la suite, tout ce qui semble mêler la mort et la vie porte le signe de l’impureté. Le peuple d’Israël relit tout le réel à l’aune de ce critère. C’est pourquoi les animaux dits « impurs » ne sont pas impurs en eux-mêmes, mais impurs « pour vous », dit Dieu à Israël. Israël est invité à appliquer à tout le créé cette grille de lecture pour bien manifester que Dieu est étranger à toute mort. Jésus n’est pas venu abolir cette distinction. Il vient au contraire manifester qu’il obtient, lui-même, la victoire définitive de la vie sur la mort ! En lui, il n’y a pas de mélange : la pureté se diffuse à partir de lui seul. Pour cela, il plonge au cœur même de l’impureté, la mort, pour nous en tirer. Ainsi, nous pouvons dire avec le lépreux de l’évangile : « si tu le veux, tu peux me purifier. ».
P. Philippe Cazala